Au lendemain de l’attaque de Nice, le 14 juillet dernier, Eric Ciotti, Député, Président de notre Conseil Départemental, affirmait la nécessité de prendre exemple sur l’État Hébreu :« Israël est un exemple en matière de lutte contre le terrorisme ; la France, qui a les mêmes ennemis, doit s’en inspirer. »
C’est, à nouveau, ce qu’il a déclaré, sur son compte Twitter, le jour de son départ pour Israël, le dimanche 7 août 2016, en compagnie de son collègue, le député LR Guillaume Larrivé.
Au programme de ces trois jours de visite, les deux députés français se sont entretenus avec des spécialistes de la sécurité et des renseignements. Ils se sont notamment rendus à Tel Aviv, à l’Institut d’études de Sécurité Nationale , ainsi qu’au quartier général du Magen David Adom (Croix rouge israélienne).
Éric Ciotti et Guillaume Larrivé ont notamment rencontré le député israélien Yaïr Lapid, rapporte le site de la Septième chaîne israélienne. En sa compagnie, ils se sont recueillis au café Simta, rue Dizengoff, à Tel Aviv, où, le premier 1er janvier dernier, Alon Bakal et Shimon Ruimi ont été assassinés par un terroriste. Yaïr Lapid avait choisi ce lieu symbolique pour illustrer la manière dont les Israéliens vivent la menace terroriste quotidienne. Il a notamment déclaré aux députés français :
« Israël a dû affronter ces derniers mois une vague de terreur diabolique perpétrée par des gens prêts à utiliser tous les moyens. La France s’est également retrouvée à faire face à des attaques islamistes qui tentent de menacer ses valeurs fondamentales. Le terrorisme doit être combattu avec force et détermination. Israël et la France sont de vieux alliés qui partagent les mêmes intérêts, et nous devons coopérer dans la lutte conte le terrorisme ».
Et c’est là que je me vois obligé de mettre en face de ce témoignage de Yaïr Lapid celui que j’ai recueilli auprès de Yaïr Auron, professeur d’histoire à l’ Université de Jérusalem, spécialisé dans l’étude de la Shoa. Il s’agit-là d’une interview que j’ai recueillie en mai 2010. Mais elle garde aujourd’hui toute sa force, et toute son actualité. (1)
Yaïr Auron déclare, dans cette interview, que l’Etat d’Israël, sa patrie, est menacé de disparaître si les Israéliens et les Palestiniens ne parviennent pas un accord portant sur le partage d’un territoire accepté par les deux parties et débouchant sur la création d’un Etat Palestinien.
Et il ajoute qu’à son avis, Israel ne consentira à un tel accord que sous la pression de l’Europe et des Etats-Unis.
Yaïr Auron ne peut être soupçonné d’une quelconque complicité avec la cause palestinienne. Mais, avec beaucoup d’observateurs du conflit qui menace l’avenir de Jérusalem – comme celui du monde entier – il a le courage de mettre le doigt sur le cœur du problème.
Certes, il ne s’agit pas d’accepter le terrorisme, ni, bien sûr, de renoncer à le combattre.
Mais il faut aussi voir la grave difficulté qui, sans l’excuser le moins du monde, est pourtant la cause profonde de ce terrorisme : le peuple palestinien, est, aujourd’hui encore, privé de la terre qui lui a été promise.
Je me permets, une fois de plus, de rappeler la décision de l’Assemblée Générale de l’ONU en date du 29 novembre 1947 créant un État Juif et un État Arabe. L’Etat Juif a été créé en 1948. L’Etat Arabe reste créer. Aujourd’hui, la Cisjordanie se présente comme le seul territoire
susceptible de donner lieu la création d’un État Palestinien. Encore faut-il qu’elle cesse de faire l’objet de ce que l’on doit bien appeler une colonisation israélienne. Et la création, en Cisjordanie, d’un État Palestinien ne peut que résulter d’un accord international, tel qu’une décision de l’ONU.
Pour ma part, je ne peux m’empêcher de penser que la démarche d’Eric Ciotti, même si elle s’appuie sur la nécessité d’une lutte contre le terrorisme, est malheureusement de nature à occulter le grave problème qui menace la paix dans notre monde : celui de créer enfin un État Palestinien en Cisjordanie.
Je me suis donc adressé directement à Eric Ciotti, le 12 août dernier, en me permettant de lui poser cette question: « Monsieur le Député, pensez-vous, oui ou non, que la lutte contre le terrorisme doit nécessairement s’accompagner de la création d’un État Palestinien? »
Je n’ai pas, pour le moment, reçu de réponse sa part.
Je crois, pourtant que la lutte, nécessaire et urgente, contre le terrorisme islamiste doit s’accompagner de la création, elle aussi nécessaire et urgente d’un Etat Palestinien. Cette création suppose une action de l’O N U, que les démocraties du monde entier doivent organiser.
Et la France, avec l’ensemble de ses citoyens, est appelée à cette action. Son avenir, et sa sécurité, en dépendent.
Pierre Marchou
(1) Cette interview figure dans la version internet de mon livre « Est-ce que Vence et Jérusalem ont quelque chose se dire? » On peut accéder gratuitement à cet ouvrage en se rendant sur le site « 06demain.fr