Jusqu’en 2005, la sécurité du territoire de la commune de Vence était confiée à la police nationale. Depuis cette date, l’Etat a décidé de confier désormais cette charge à la gendarmerie. Cette dernière était, jusques là, compétente pour l’ensemble du territoire du canton de Vence, à l’exception toutefois de la commune centre. Les Vençois, dans leur ensemble ont bien accueilli cette arrivée des gendarmes.Cette nouvelle situation rendait nécessaire la construction d’une nouvelle caserne de gendarmerie.
La procédure habituelle, pour réaliser une telle construction, était, jusqu’à une date récente, la suivante : le Département assurait la charge financière de la construction et se remboursait ensuite de cet investissement en louant la caserne à l’état. Le terrain était habituellement fourni par la collectivité territoriale qui allait bénéficier de la présence des gendarmes. En l’espèce, Vence, a proposé au Département un terrain susceptible d’accueillir la caserne, dans le quartier des Meillières, et ce dernier fut accepté par le Département.Restait alors à assurer la construction du bâtiment. Jusqu’à ces dernières années, le projet de construction faisait l’objet d’un concours ouvert à l’ensemble des architectes. Un jury, composé d’un certain nombre d’élus (du Département et de la commune intéressée) et d’autorités compétentes (Architecte des Bâtiments de France, Gendarmerie, Service de l’Equipement et autres) retenait le projet qui se révélait le meilleur.
Depuis 2005, le Département des Alpes-Maritimes a adopté une nouvelle façon de faire. Il fallait construire plusieurs casernes à court terme. Pour alléger la charge financière qui en aurait résulté pour le Département, ce dernier à décidé de proposer à un promoteur privé, recruté par voie d’adjudication, de financer la construction en se retournant vers l’Etat pour percevoir le loyer qui, jusque là, revenait au Département. Le promoteur, une fois remboursé de ses frais, devra rétrocéder la propriété de l’immeuble au département (au bout de trente ans ou plus si nécessaire). C’est la procédure dite du « Bail emphytéotique administratif ».Malheureusement, le Département, en l’occurrence, a renoncé à imposer au promoteur d’organiser un concours d’architecture, ce qui permet évidemment à ce dernier de mieux prévoir les frais financiers qu’il va engager pour la construction. Mais la conséquence grave, c’est que la collectivité territoriale qui va recevoir la caserne a moins de chances de bénéficier d’une construction de qualité.
C’est, hélas, ce qui vient de se vérifier à Vence. Le projet proposé par le promoteur dans le cadre d’une demande de permis de construire, déposée à la Mairie de Vence le 19 septembre 2007, n’a pas été accepté, suite à un avis défavorable de la commission communale d’urbanisme et à un avis également négatif de l’Architecte des Bâtiments de France, représentant de l’Etat.Des négociations entre la Mairie et le promoteur se sont alors engagées en vue de la modification du projet. Elles étaient en cours lors des dernières élections municipales. Les négociations ont ensuite repris avec la Commission d’Urbanisme issue de la nouvelle municipalité et un accord semble être intervenu, puisque le promoteur a enfin obtenu son permis de construire, en novembre 2008.
Pour autant, les documents officiels ne témoignent pas d’un projet de qualité, véritablement nouveau. Et c’est bien regrettable.
A ce stade du dossier, il me parait utile de formuler deux remarques :
1/ Il est dommage que la procédure du concours d’architecture ait été abandonnée par le Département, car elle est seule à donner ses chances à un projet de qualité. On peut certes comprendre qu’une entreprise privée ait besoin de connaître la charge de ses obligations financières avant de s’engager dans un contrat. Mais cette nécessité pourrait très bien s’accommoder d’une procédure qui prévoirait, dans un premier temps, un concours d’architecture organisé par la puissance publique (département ou commune). Une fois le projet arrêté, il pourrait être présenté aux promoteurs dans le cadre d’une procédure d’adjudication. Les promoteurs seraient alors en mesure d’évaluer avec précision les charges qu’ils seraient amenés à mettre en oeuvre. On pourrait ainsi concilier la qualité de la construction avec le souci de confier à une entreprise privée la charge financière de l’opération.
2/ Dans sa forme actuelle, le projet prévoit un seul accès donnant sur l’avenue Emile Hugues. Celle-ci connaît quotidiennement des embouteillages, les jours de semaine, entre 16 et 18 heures. Cela constitue une menace sérieuse pour la mobilité opérationnelle des gendarmes. Le projet initial prévoyait un second accès, grâce à la construction d’une voie carrossable qui devait relier la caserne à l’Avenue du Colonel Méyère. Le département, convaincu de l’utilité de cette nouvelle voie pour la gendarmerie avait proposé de participer largement aux frais de sa construction. Les motifs invoqués pour renoncer à l’ouverture de cette voie ne semblent pas bien solides. La question mérite d’être posée à nouveau, et au grand jour. Car l’enjeu est de taille : la future caserne ne doit pas courir le risque d’être, de temps à autre, incapable de remplir sa mission, qui est de répondre à tout appel d’urgence, sur l’ensemble du territoire de la commune.
Pierre Marchou